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Photos Europe bis: Alsace,Allemagne,Autriche,Suisse,Savoie,Bretagne,Paris.
Zell am See, Serfaus, Ischgl, Tirol (Autriche) et Rixheim. E Fiehjohr fer unseri Sproch 2002, un printemps pour notre langue alsacienne."Les Chats Perchés", création de l'ATELIER, Théâtre du collège épiscopal de Zilisheim (photos C.H.2000-2002). Victor HUGO, Le Rhin
Vevey - Chillon - Lausanne ... Le soir, - c'était hier, - je me suis promené au bord du lac. J'ai bien pensé à vous, Louis, et à nos douces promenades de 1828, quand nous avions vingt-quatre ans, quand vous faisiez Mazeppa, quand je faisais les Orientales, quand nous nous contentions d'un rayon horizontal du couchant étalé sur Vaugirard. La lune était presque dans son plein. La haute crête de Meillerie, noire au sommet et vaguement modelée à mi-côte, emplissait l'horizon. Au fond, à ma gauche, au-dessous de la lune, les dents d'Oche mordaient un charmant nuage gris perle, et toutes sortes de montagnes fuyaient tumultueusement dans la vapeur. L'admirable clarté de la lune calmait tout ce côté violent du paysage. Je marchais au bord même du flot. C'était la nuit de l'équinoxe. Le lac avait cette agitation fébrile qui, à l'époque des grandes marées, saisit toutes les masses d'eau et les fait frissonner. de petites lames envahissaient par moments le sentier de cailloux où j'étais, et mouillaient la semelle de mes bottes. A l'ouest vers Genève, le lac, perdu dans les brumes, avait l'aspect d'une énorme ardoise. des bruits de voix m'arrivaient de la ville, et je voyais sortir du port de Vevey un bateau allant à la pêche. Ces bateaux pêcheurs du Leman ont une forme que le lac leur a donnée. Ils sont munis de deux voiles latines attachées en sens inverse à deux mâts différents, afin de saisir les deux grands vents qui s'engouffrent dans le Leman par ses deux bouts; l'un par Genève, qui vient des plaines, l'autre par Villeneuve, qui vient des montagnes. Au jour, au soleil, le lac est bleu, les voiles ont blanches, et elles donnent à la barque la figure d'une mouche qui courrait sur l'eau, les ailes dressées. La nuit, l'eau est grise et la mouche est noire. Je regardais donc cette gigantesque mouche, qui marchait lentement vers Meillerie, découpant sur la clarté de la lune ses ailes membraneuses et transparentes. Le lac jasait à mes pieds. Il y avait une paix immense dans cette immense nature. C'était grand et c'était doux. Un quart d'heure après, la barque avait disparu, la fièvre du lac s'était calmée, la ville s'était endormie. J'étais seul, mais je sentais vivre et rêver toute la création autour de moi... Victor Hugo, Le Rhin
Zoo de Bâle (Suisse) Sundgau, Vosges, autour du Mont-blanc, Heidelberg, Francfort sur le Main, Fort romain sur le limes à Saalburg, duel Armstrong-Ullrich dans le Tour de France 2000 à Rixheim, rue de Mulhouse et Europapark, Rust (Allemagne), Paris, Côte d'Azur (photos C.H. 2000-2003).
Heidelberg...Le même jour, c'était vers le soir, j'avais quitté à midi la ville par le chemin dit des Philosophes, lequel chemin s'en va je ne sais où, comme il sied à un chemin de philosophes, et j'étais dans un vallon quelconque. Je me mis à gravir l'escarpement d'une haute colline par un de ces chemins antiques qu'on trouve souvent dans ce pays, sentiers-escaliers, pavés de grosses roches brutes, qui ont l'air d'un mur cyclopéen posé à plat sur le sol, attribués d'ailleurs par les ignorants aux géants, et par les savants aux romains, c'est à dire toujours aux géants. Le jour s'éteignait derrière moi dans la plaine du Rhin... Comme je me promenais sur cette croupe, j'aperçus à quelques pas d'un sentier à peine distinct, sous des buissons hérissés, une espèce de trou vers lequel je me dirigeai. C'était une assez grande fosse carrée, profonde de dix ou douze pieds, large de huit ou neuf, dans laquelle s'affaissaient des ronces rougeâtres, et où des rayons de la lune entraient par les crevasses de la broussaille. Je distinguais vaguement au fond un pavage à larges dalles miné par les pluies, et sur les quatre parois une puissante maçonnerie de pierres énormes, devenue informe et hideuse sous les herbes et les mousses. il me semblait voir sur le pavé quelques sculptures frustes mêlées à des décombres, et parmi ces décombres un gros bloc arrondi, grossièrement évasé, percé à son milieu d'un petit trou carré, qui pouvait être un autel celtique ou un chapiteau du dixième siècle. Du reste, aucun degré pour descendre dans l'excavation. ce n'était peut-être qu'une simple citerne, mais je vous assure que l'heure, le lieu, la lune, les ronces et les choses confuses entrevues au fond, donnaient je ne sais quoi de formidable et de sauvage à cette mystérieuse chambre sans escalier, enfoncée dans la terre, avec le ciel pour plafond. Qu'était-ce que cette fosse singulière ? Vous me connaissez, je m'obstine, je cherche, je veux en savoir sur cette cave plus que la lune et le désert ne m'en disent; j'écarte les ronces avec ma canne, je m'accroche à des sarments que je prends à poignées, et je me penche sur cette ombre. En ce nomment-là, j'entends une vois grave et cassée prononcer distinctement derrière moi ce mot : Heidenloch. Dans le peu d'allemand que je sais, je sais ce mot. Il signifie : trou des Païens. Je me retourne. Personne dans la bruyère ; le vent qui souffle et la lune qui éclaire. Rien de plus. Seulement , il me semble qu'il y a là, du côté de la forêt, à une trentaine de pas, entre la lune et moi, une masse d'ombre, une haute broussaille que je n'ai pas encore remarquée. Je crois m'être trompé, et que, comme tous ceux qui se promènent dans les solitudes, je deviens un peu visionnaire, et je me remets à explorer le bord de la fosse. Ici la voix s'élève une seconde fois, et j'entends de nouveau derrière moi les trois syllabes étranges : Heidenloch. Pour le coup je me retourne vivement et, à mon tour, je dis à vois haute : Qui est là ? En cet instant, je crois remarquer, non sans quelque frisson involontaire, je vous l'avoue, que la haute broussaille s'est approchée de quelques pas. Je répète : Qui est là ? et, au moment où j'allais marcher résolument à elle, je la vois qui vient à moi, et j'entends sortir pour la troisième fois la voix décrépite qui dit : Heidenloch. Dans ces lieux déserts, à ces heures bizarres de la nuit, on est tendre aux superstitions, et je vous déclare que toutes les légendes du Rhin et du Neckar commençaient à me revenir à l'esprit, et me montaient au cerveau comme une fumée, lorsque le buisson surnaturel se retourna. Alors ce qui était dans l'ombre fit face à la lune, et j'aperçu une petite vielle courbée jusqu'au menton sur un bâton à gros nœuds, presque enfouie sous un gros tas de branchages qui la débordait de tous les côtés, balayant la terre derrière elle et se balançant au-dessus de sa tête de la manière la plus fantastique. Elle me regardait avec ses yeux gris en répétant : Heidenloch ! Heidenloch ! On eût dit une vielle dryade chassée par les bûcherons, emportant son arbre sur son dos. C'était tout simplement une pauvre bonne femme qui revenait de couper des broussailles dans la forêt, qui avait aperçu un étranger, et qui lui avait donné un renseignement, et qui maintenant regagnait sa chaumière au clair de la lune, traînant son fagot par le sentier des géants. Je l'ai remercié de quelques kreutzers, tout en la considérant avec admiration. Je n'ai vu de ma vie une plus petite vielle sous un plus énorme fagot. Elle m'adressa, avec un grognement reconnaissant, une affreuse grimace gracieuse, qui était, il y a cinquante ans, un frais et charmant sourire. Puis elle me tourna le dos, c'est à dire la broussaille; et, au bout de quelques minutes, arrivée à la pente du mont, elle s'enfonça dans la terre, et s'évanouit comme une apparition. Son explication, du reste, n'expliquait rien. C'était un mot lugubre ajouté à une chose lugubre. Voilà tout. Je vous avoue que je suis resté longtemps à cette place, regardant le trou des païens, qui est peut-être la tombe ouverte et vide d'un géant, peut-être une chambre druidique, peut-être le puisard d'un camp romain, ou le réservoir pluvial de quelque couvent byzantin disparu, ou la hideuse caverne sépulcrale d'un gibet démoli; dont les parois silencieuses ont peut-être été arrosées de sang humain, ou comblées de squelettes, ou assourdies par la danse du sabbat tournant autour de l'ossuaire ; fosse pleine de ténèbres, dans laquelle la lune jette aujourd'hui un regard livide, et une vielle femme un mot sinistre... Victor Hugo, Le Rhin
Francfort sur le Main... Après la salle des électeurs, j'ai vu la salle des empereurs. Au quatorzième siècle, les marchands lombards qui ont laissé leur nom au Roemer, et qui y tenaient boutique, eurent idée de faire entourer la grande salle de niches afin d'y étaler leurs marchandises. Un architecte dont le nom s'est perdu mesura le pourtour de la salle et y construisit quarante-cinq niches. En 1564, Maximilien II fut élu à Francfort et montré au peuple du balcon de cette salle, qui, à partir de Maximilien II, s'appela le Kaisersaal et servit à la proclamation des empereurs; On songea alors à la décorer, et la première pensée qui vint, ce fut d'installer, dans les niches développées autour de la halle impériale, les portraits de tous les césars allemands élus et couronnés depuis l'extinction de la race de Charlemagne, en réservant aux césars futurs les niches vacantes. Seulement, depuis Conrad I, en 911, jusqu'à Ferdinand I, en 1556, trente-six empereurs avaient déjà été sacrés à Aix-la-Chapelle. En y joignant le nouveau roi des Romains, il ne restait plus que huit niches vides pour l'avenir. C'était bien peu. La chose fut pourtant exécutée, et l'on se promit d'agrandir la salle quand le besoin serait. Les cases se meublaient peu à peu; à quatre empereurs environ par siècle. En 1764, quand Joseph II monta sur le trône impérial sacrocésaréen, il ne restait plus qu'une place vide. On songea de nouveau sérieusement à allonger le Kaisersaal et à ajouter de nouvelles cases aux compartiments préparés cinq siècles auparavant par l'architecte des marchands lombards. En 1794, François II, le quarante cinquième roi des Romains, vint occuper la quarante-cinquième case. C'était la dernière niche, ce fut le dernier empereur. La salle remplie, l'empire germanique s'écroula. Cet architecte inconnu, c'était la destinée; cette salle mystérieuse aux quarante-cinq cellules, c'est l'histoire même de l'Allemagne, qui, la race de Charlemagne éteinte, ne devait plus contenir que quarante-cinq empereurs... Victor Hugo, Le Rhin
Strasbourg... L'église vue, je suis monté sur le clocher. Vous connaissez mon goût pour le voyage perpendiculaire. Je n'aurai eu garde de manquer la plus haute flèche du monde. Le Munster de Strasbourg a près de cinq cents pieds de haut. Il est de la famille des clochers accostés d'escaliers à jour. C'est une chose admirable de circuler dans cette monstrueuse masse de pierre toute pénétrée d'air et de lumière, évidée comme un joujou de Dieppe, lanterne aussi bien que pyramide, qui vibre et qui palpite à tous les souffles du vent. Je suis monté jusqu'au haut des escaliers verticaux. J'ai rencontré en montant un visiteur qui descendait tout pâle et tout tremblant, à demi porté par son guide. Il n'y a pourtant aucun danger. Le danger pourrait commencer au point où je me suis arrêté, à la naissance de la flèche proprement dite. Quatre escaliers à jour, en spirale, correspondant aux quatre tourelles verticales, enroulés dans un enchevêtrement délicat de pierre amenuisée et ouvragée, s'appuient sur la flèche, dont ils suivent l'angle, et rampent jusqu'à ce qu'on appelle la couronne, à environ trente pieds de distance de la lanterne surmontée d'une croix qui fait le sommet du clocher. Les marches de ces escaliers sont très hautes et très étroites, et vont se rétrécissant à mesure qu'on monte. Si bien qu'en haut elles ont à peine la saillie du talon. Il faut gravir ainsi une centaine de pieds, et l'on est à quatre cents pieds du pavé. Point de garde-fous, ou si peu, qu'il n'est pas la peine d'en parler. L'entrée de cet escalier est fermée par une grille en fer. On n'ouvre cette grille que sur une permission spéciale du maire de Strasbourg, et l'on ne peut monter qu'accompagné de deux ouvriers couvreurs, qui vous nouent autour du corps une corde dont ils attachent le bout de distance en distance, à mesure que vous montez, aux barres de fer qui relient les meneaux. Il y a huit jours, trois femmes, trois Allemandes, une mère et ses deux filles, ont fait cette ascension. Du reste, personne, excepté les couvreurs qui ont à restaurer le clocher, ne monte jusqu'à la lanterne. Là il n'y a plus d'escalier, mais de simples barres de fer disposées en échelons. D'où j'étais, la vue est admirable. On a Strasbourg sous ses pieds, vieille ville à pignons dentelés et à grands toits chargés de lucarnes, coupée de tours et d'églises, aussi pittoresque qu'aucune ville de Flandre. L'Ill et le Rhin, deux jolies rivières, égaient ce sombre amas d'édifices de leurs flaques d'eau claires et vertes. Tout autour des murailles s'étend à perte de vue une immense campagne pleine d'arbres et semée de villages. Le Rhin, qui s'approche à une lieue de la ville, court dans cette campagne en se tordant sur lui-même. En faisant le tour du clocher on voit trois chaînes de montagnes, les croupes de la Forêt-Noire au nord, les Vosges à l'ouest, au midi les Alpes. On est si haut, que le paysage n'est plus un paysage ; c'est, comme ce que je voyais sur la montagne de Heidelberg, une carte de géographie, mais une carte de géographie vivante, avec des brumes, des fumées, des ombres et des lueurs, des frémissements d'eaux et de feuilles, des nuées, des pluies et des rayons de soleil. Le soleil fait volontiers fête à ceux qui sont sur de grands sommets. Au moment où j'étais sur le Munster il a tout à coup dérangé les nuages dont le ciel avait été couvert toute la journée, et il a mis le feu à toutes les fumées... Victor Hugo, Le Rhin
BIBLIOGRAPHIE :
HUGO Victor, Le Rhin, éd.La Nuée Bleue, Bueb et Reumaux 1991. " ... Vous savez, je vous l'ai dit souvent, j'aime les fleuves. Les fleuves charrient les idées aussi bien que les marchandises. Tout a son rôle magnifique dans la création. Les fleuves, comme d'immenses clairons, chantent à l'océan la beauté de la terre, la culture des champs, la splendeurs des villes et la gloire des hommes. Et, je vous l'ai dit aussi, entre tous les fleuves, j'aime le Rhin... Oui mon ami, c'est un noble fleuve, féodal, républicain, impérial, digne d'être à la fois français et allemand. Il y a toute l'histoire de l'Europe considérée sous ses deux grands aspects, dans ce fleuve des guerriers et des penseurs, dans cette vague superbe qui fait bondir la France, dans ce murmure profond qui fait rêver l'Allemagne. Le Rhin réunit tout. Le Rhin est rapide comme le Rhône, large comme la Loire, encaissé comme la Meuse, tortueux comme la Seine, limpide et vert comme la Somme, historique comme le Tibre, royal comme le Danube, mystérieux comme le Nil, pailleté d'or comme un fleuve d'Amérique, couvert de fables et de fantômes comme un fleuve d'Asie... " Victor Hugo
" ... Ainsi doit se lire Le Rhin : comme une prodigieuse remontée, par les contes et les mythes, vers le monde perdu de la Parole. Si l'Allemagne, comme il nous est dit dans le texte, désigne dans chaque homme les sens et la France l'intellect, le Rhin apparaît bien alors comme le grand fleuve de l'imagination créatrice qui les pourrait unir - ce tiers-monde médiateur où les corps se spiritualisent et s'incarnent les idées, où l'intelligible et le sensible se symbolisent. Ici, dans ce pressentiment, à travers les jeux de la fiction, d'un Orient intérieur dont l'art aurait les clés, déjà s'annonce le grand Hugo, le gnostique visionnaire de La Légende des Siècles, de Dieu, de La fin de Satan... Rien que du vent, diront les esprits forts, que ces musiques de l'âme - qu'elles se taisent, pourtant, et le monde se meurt. Poètes, éveilleurs d'âmes, souffleurs de vent, derniers baladins, peut-être, du monde occidental, au bord du précipice, dans cette agonie insupportable de la raison politique, quand la société peu à peu se défait, il nous reste cela : ranimer sans cesse la parole du monde, qui ne fut jamais aussi menacée, rappeler qu'une communauté est d'abord une idée, une mémoire, un rêve, à inventer continûment, et que l'esprit seul a puissance de sauver le monde... " Michel Le Bris
musique : Les gens du Nord (Enrico Macias)
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